- Randall Bartlett
Économiste en chef adjoint
La Banque du Canada abaisse son taux directeur comme prévu, mais une nouvelle baisse en avril n’est pas garantie
Banque du Canada (BdC)
- Comme les économistes et les marchés s’y attendaient largement, la Banque du Canada (BdC) a abaissé aujourd’hui le taux des fonds à un jour de 25 points de base pour le porter à 2,75 %. Il s’agit de la septième baisse de taux consécutive depuis juin dernier. Le taux directeur avait atteint un sommet de 5,00 % en juillet 2023. Le niveau d’aujourd’hui représente le point médian de la fourchette du taux neutre estimée par la BdC, c’est-à-dire qu’il n’est ni stimulant ni restrictif.
- Dans le communiqué de presse Lien externe au site., le conseil de direction a reconnu la solide performance de l’économie canadienne à la fin de 2024, au-delà des attentes de la BdC (graphique 1). La vigueur de la demande intérieure, soutenue par les baisses de taux passées, a joué un rôle important. « Toutefois, la croissance au premier trimestre de 2025 va probablement ralentir, l’intensification du conflit commercial pesant sur la confiance et l’activité. Les résultats de récentes enquêtes semblent indiquer que la confiance des consommateurs est en forte baisse et que les entreprises réduisent leurs dépenses en reportant ou en annulant des projets d’investissement. » Bien que le bond des exportations en prévision des droits de douane compensera la faiblesse de la demande intérieure au premier trimestre, la BdC ne prévoit pas que cette situation durera. Elle a aussi attribué le ralentissement du marché du travail en février à l’incertitude engendrée par les tensions commerciales.
- Contrairement aux indicateurs économiques qui s’affaiblissent, les mesures privilégiées de l’inflation fondamentale de la BdC ont toutes dépassé les 2 % selon les dernières données. L’inflation aurait également été supérieure au résultat de 1,9 % en janvier n’eût été le congé de TPS/TVH, et elle devrait atteindre environ 2,5 % à la fin de cet allégement fiscal, selon l’estimation de la BdC. Notre analyse suggère la même chose (graphique 2).
- Dans sa déclaration préliminaire à la conférence de presse Lien externe au site., le gouverneur de la BdC, Tiff Macklem, a clairement exprimé ce que plusieurs Canadiens savent déjà, soit que les répercussions de l’incertitude et des tarifs douaniers sur l’inflation sont difficiles à évaluer. Cependant, pour essayer de comprendre les conséquences de cette incertitude liée aux tensions commerciales, la BdC a publié de nouvelles enquêtes Lien externe au site. sur ce qu’elle entend des entreprises et des ménages. Selon le gouverneur Macklem, « [m]ême s’il est encore trop tôt pour voir l’ampleur des effets des nouveaux droits de douane sur l’activité économique, les résultats de ces enquêtes semblent indiquer que les menaces tarifaires et l’incertitude entourant la relation commerciale canado-américaine ont déjà une incidence importante sur les intentions des entreprises et des consommateurs. Les gens sont plus inquiets par rapport à leur sécurité d’emploi et à leur santé financière à cause des tensions commerciales, et ils ont l’intention de dépenser avec plus de prudence. [...] Les entreprises ont revu à la baisse leurs perspectives de ventes, tout particulièrement dans le secteur manufacturier et des secteurs qui dépendent des dépenses de consommation non essentielles des ménages. [...] Les résultats de nos enquêtes permettent aussi de penser que les entreprises ont davantage l’intention de monter leurs prix du fait qu’elles doivent composer avec les coûts plus élevés découlant de l’incertitude et des droits de douane. En même temps, les attentes d’inflation ont augmenté, les Canadiennes et Canadiens anticipant de possibles hausses de prix. »
Implications
Si la baisse de taux d’aujourd’hui est conforme aux attentes du marché, le ton du communiqué de presse donne peu d’indications sur ce à quoi nous devrions nous attendre en avril. Comme l’équipe des Études économiques de Desjardins Lien externe au site. et celle de la Banque du Canada Lien externe au site. l’ont toutes deux signalé, la guerre commerciale avec les États-Unis risque d’entraîner une stagflation dans l’économie canadienne, soit la combinaison d’une hausse de l’inflation et d’une croissance plus faible du PIB réel, du moins temporairement. La BdC devra trouver l’équilibre entre ces effets et toute hausse des attentes d’inflation des Canadiens.
Par ailleurs, comme le conclut le Conseil de direction à la fin de son communiqué de presse, « [l]a politique monétaire ne peut pas neutraliser les répercussions d’une guerre commerciale. Mais elle peut – et elle doit – empêcher les hausses de prix d’alimenter l’inflation de façon durable. Le Conseil de direction mesurera avec soin l’évolution et la force des pressions sur l’inflation – celles à la baisse dues à l’affaiblissement de l’économie et celles à la hausse découlant de la montée des coûts. Le Conseil surveillera aussi de près les attentes d’inflation. La Banque s’engage à maintenir la stabilité des prix pour la population canadienne. »
La réaction du marché à la suite de l’annonce d’aujourd’hui suggère que les investisseurs reconnaissent qu’une nouvelle baisse de taux en avril n’est pas garantie. Il est clair que la BdC est soucieuse de sa crédibilité en matière de lutte contre l’inflation, qui a été mise à mal par l’expérience de la pandémie et sa tendance à avoir considéré l’accélération des prix comme étant transitoire. Nos prévisions ont intégré un profil de réduction des taux plus progressif que ce qui aurait été attendu en l’absence de pressions à la hausse sur l’inflation. Mais il est clair que la BdC voudra évaluer les données à la fois sur la croissance et sur l’inflation avant d’offrir davantage d’accommodement. Les prochaines enquêtes de la BdC auprès des entreprises et des consommateurs, publiées le 7 avril, seront surveillées de près par les participants au marché, car elles devraient fournir une nouvelle mise à jour sur l’évolution des embauches, des investissements et des attentes en matière d’inflation.
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