Randall Bartlett,
Directeur principal, économie canadienne
Le logement domine le discours économique au Canada depuis des années. Que ce soit sur les parquets de la Bourse ou autour du barbecue avec le voisin, la hausse du prix des maisons et la frénésie du marché de l’habitation ont été au cœur des discussions des Canadiens et des Canadiennes. Et maintenant que les banques centrales du monde entier resserrent agressivement leur politique monétaire pour contenir la pire inflation depuis des décennies (la Fed n’étant que l’exemple le plus récent en début de semaine), la fixation nationale sur le logement se poursuit.
Toutefois, le ton du discours a changé récemment. En effet, nous avons désormais l’impression d’avoir atteint le sommet et de commencer à regarder la descente de l’autre côté. Les données publiées plus tôt cette semaine par l’Association canadienne de l’immeuble appuient ce point de vue. L’activité des ventes est maintenant en baisse depuis trois mois consécutifs et les prix à l’échelle nationale ont chuté de plus de 10 % par rapport à leur sommet de février 2022. Et si notre récent Point de vue économique, s’avère exact, les ventes et les prix des propriétés existantes devront encore se corriger afin de rééquilibrer le marché de l’habitation. Sur le plan national, nous prévoyons que les prix des propriétés chuteront d’environ 15 % par rapport à leur sommet de février 2022 jusqu’à la fin de 2023. Cette baisse entraînera des répercussions sur tout, des mises en chantier aux dépenses en biens de consommation durables comme les appareils électroménagers. Toutes ces considérations influencent nos perspectives économiques canadiennes présentées dans nos plus récentes Prévisions économiques et financières, qui seront publiées lundi.
Mais tout n’est pas perdu. Par exemple, à la fin de l’année prochaine, nous nous attendons à ce que le prix moyen des propriétés à l’échelle nationale demeure supérieur de plus de 20 % à son niveau d’avant la COVID‑19, malgré une descente graduelle à partir du sommet atteint pendant la pandémie. Il est également probable que les résultats du marché du logement varient considérablement d’une province ou d’une collectivité à l’autre au pays. Celles qui ont connu la plus forte hausse subiront probablement la correction la plus sévère, mais aucune province ne devrait voir les prix des propriétés retomber sous leurs niveaux prépandémiques. En effet, les facteurs fondamentaux qui sous-tendent le marché canadien de l’habitation demeurent solides. Ils comprennent notamment un marché du travail vigoureux et des ménages en bonne santé financière, des niveaux élevés d’immigration et une forme de travail à distance à temps plein ou à temps partiel qui facilitera la vie des Canadiens et des Canadiennes qui veulent habiter dans de petites villes et des villages. Ce dernier facteur devrait offrir une aide jamais vue auparavant aux gens qui achètent une maison et qui demeurent dans des endroits plus abordables. Dans l’ensemble, cela devrait favoriser le retour à l’équilibre du marché canadien de l’habitation après une période prolongée d’excès.
Il est également encourageant de voir que les décideurs politiques se concentrent davantage sur l’abordabilité. Comme l’économiste en chef du Mouvement Desjardins, Jimmy Jean, l’a récemment mentionné, « De nombreuses politiques ont été mises de l’avant, mais la question demeure : feront-elles bouger l’aiguille, et si oui, de combien? ». Jusqu’à maintenant, les efforts visant à accroître l’offre de logements n’ont pas été suffisants pour améliorer sensiblement l’abordabilité du logement au Canada. Mais ça reste un bon début. En effet, la première étape pour résoudre un problème consiste à reconnaître qu’il y en a un. Les politiciens ont franchi ce pas. Maintenant, voyons s’ils peuvent tenir leurs promesses et contribuer à améliorer l’abordabilité et l’accessibilité des logements pour tous les Canadiens et toutes les Canadiennes.
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