Choisir vos paramètres

Choisir votre langue
Diversité et inclusion

Autiste : tomber dans le vide ou… prendre son envol à 21 ans

14 avril 2022

Charles Lafortune, Sophie Prégent, et leur fils, Mathis

Entrevue spéciale avec Charles Lafortune

C’est bien connu, Charles Lafortune et Sophie Prégent sont les parents de Mathis qui est autiste. Ce qui est moins connu, c’est le manque de ressources disponibles pour les autistes et leurs parents quand leur enfant atteint la majorité. C’est pour leur venir en aide que le couple d’artistes a lancé la Fondation Autiste & majeur, une cause que Desjardins soutient d’ailleurs à hauteur de 500 000 $.  

« Avant l’âge de 21 ans, les enfants autistes ont accès à des services adaptés pour soutenir leur développement. Ça change du tout au tout quand ils sont majeurs, même qu’à partir de 21 ans, ils n’ont plus la possibilité d’être scolarisés. On a alors l’impression que nos enfants tombent dans le vide. On doit assurer une présence continue et ça devient très compliqué », explique l’animateur et comédien qui est aussi producteur exécutif et vice-président Contenu et Création chez Pixcom.

Comme Mathis a aujourd’hui 20 ans, Charles et Sophie sont confrontés à cette situation. « En juin 2023, ce sera la fin de l’école pour lui, précise son père. On s’est demandé comment on pourrait lui permettre de poursuivre son développement. C’est pour aider les parents à faire face à cette situation qu’on a décidé de mettre sur pied la Fondation Autiste & majeur. »

La mission ? Financer des centres de jour qui proposent des activités favorisant le développement et le maintien des acquis de l’adulte autiste. La musicothérapie, la zoothérapie, l’activité physique, les loisirs et les arts sont, par exemple, des domaines dans lesquels les participants apprennent à mieux connaître leurs forces et leurs intérêts et vivent des réussites au quotidien. De plus, la Fondation aidera ces centres à proposer aux adultes autistes des activités pour développer leur potentiel sur le plan du travail.

« Il faut savoir qu’il y a très peu de centres de jour destinés uniquement aux autistes. De nombreux établissements s’adressent à la fois aux personnes autistes et aux personnes handicapées ou ayant des déficiences intellectuelles. Or, les autistes ont besoin d’un endroit adapté à leur condition. »

Besoin d’argent

Après avoir jeté les bases de leur fondation, les deux artistes se sont mis à la recherche de partenaires financiers pour les aider à remplir sa mission. La réponse a été au-delà de leurs espérances. « Rapidement, beaucoup de gens ont levé la main pour embarquer dans notre projet », précise Charles, encore touché par cet accueil sincère.

Ils ont notamment cogné à la porte de Desjardins qui appuiera le développement de l’offre de services des centres de jour à la hauteur de 500 000 $

Des parents et des enfants laissés à eux-mêmes

À travers ces services, la Fondation veut aider les autistes, mais aussi leur famille. « Si un des parents doit arrêter de travailler pour s’occuper de son jeune, cela crée un appauvrissement de la famille, mais aussi de la société puisque la personne ne paie plus d’impôt. Les parents ont aussi besoin de savoir que leur jeune a un endroit où il est aimé, respecté et où il peut se réaliser, socialiser et vivre des expériences en dehors du cercle familial. C’est important et rassurant pour les parents qui savent ainsi qu’ils ne sont pas seuls, qu’ils ont un réseau de soutien », mentionne Charles Lafortune.

Valérie Lavoie, première vice-présidente, Assurance de dommages chez Desjardins, est bien placée pour le savoir. Son fils aîné, Jonathan, âgé de 24 ans, est autiste et atteint d’une dyspraxie, un trouble du développement moteur qui rend certains gestes difficiles à exécuter, comme boutonner les vêtements ou couper la nourriture, par exemple. « Après avoir fréquenté une classe spécialisée dans une école régulière jusqu’à ses 21 ans, Jonathan est aujourd’hui inscrit à l’éducation aux adultes à raison de trois jours par semaine, explique Mme Lavoie. Il est dans une classe avec d’autres autistes où il apprend à devenir plus autonome. Et une journée par semaine, il fréquente un organisme qui offre un milieu de formation adapté afin de développer l’employabilité de nos adultes autistes. »

Valérie Lavoie, première vice-présidente, Assurance de dommages chez Desjardins, et son fils, Jonathan

Comme les autres parents, Valérie Lavoie et son mari ont dû composer avec la fin de plusieurs services quand leur fils a atteint l’âge adulte. Du jour au lendemain ou presque, il leur a fallu trouver d’autres organismes qui pouvaient aider Jonathan à poursuivre son développement. Les parents sont beaucoup laissés à eux-mêmes rendus à ce stade, déplore-t-elle. « Quand Jonathan avait 15 ou 16 ans, j’ai demandé à son éducatrice d’avoir un plan pour l’amener à être plus autonome. Je voulais connaître les différentes étapes que nous aurions à passer. Elle a été surprise par ma demande. Les services pour autistes sont segmentés selon les âges. C’est donc difficile de savoir ce qui arrive une fois qu’ils sont majeurs. C’est le parcours du combattant. »

Pour Valérie Lavoie, il est clair que Jonathan demeurera à la maison aussi longtemps qu’il le faudra. « On va l’accompagner du mieux que l’on peut, dit-elle. Il reste que la plus grande angoisse des parents d’autistes, c’est de se demander ce qu’il lui arrivera quand on ne sera plus là. »

Apprendre au contact des autistes

Le quotidien des parents d’autistes est exigeant et rempli de défis. Mais autant Charles Lafortune que Valérie Lavoie s’accordent à dire que leur enfant leur apporte aussi de grandes joies et de belles leçons de vie.

« Jonathan est une grande source d’inspiration pour moi dans sa capacité d’adaptation, confie-t-elle. On lui demande tellement souvent de se dépasser. Il fait face à de grands défis et ses efforts s’échelonnent parfois sur une longue période. Notamment, c’est à 14 ans qu’il a réussi à monter la fermeture éclair de son pantalon seul pour la première fois. Il a pratiqué chaque matin pendant des mois à boutonner sa chemise, il a persévéré et il y arrive plus facilement aujourd’hui. Ainsi quand je me trouve face à une difficulté, quelle qu’elle soit, je pense à mon fils et ça me donne l’élan pour continuer. Aujourd’hui, il fait de plus en plus de choses par lui-même et ça le rend tellement fier. Les autistes ont aussi besoin de nourrir leur estime de soi. »

« Mathis nous a appris la résilience, la patience et l’importance de célébrer les victoires, même les plus petites, affirme pour sa part Charles Lafortune. Actuellement, je célèbre le fait qu’il met lui-même son antisudorifique! Ça peut paraître banal, mais il a fallu beaucoup de travail pour en arriver là. Pour plein de choses, que ce soit le brossage des dents ou aller chercher son sac d’école, il faut répéter et répéter encore, et ça finit par donner des résultats. »

Préparer l’avenir de son enfant

 « Quand on a un enfant différent, on a plusieurs préoccupations : d’abord, s’assurer de son bien-être au quotidien avec un projet éducatif et des services adaptés à ses besoins et planifier son avenir, notamment l’aspect financier, explique l’animateur. On a la chance de pouvoir contribuer à un régime enregistré d’épargne-invalidité qui aide à épargner pour la sécurité financière à long terme de Mathis. Il faut mettre en place une fiducie familiale et testamentaire. On doit aussi s’assurer qu’il obtient tout ce à quoi il a droit comme la solidarité sociale, la couverture des médicaments, etc. »

Il faut savoir qu’à partir de 18 ans, les autistes qui sont déclarés inaptes tombent sous la responsabilité de la curatelle publique. Actuellement, la loi prévoit que seul un des deux parents peut être curateur, ce qui est appelé à changer avec la refonte de la loi, sauf qu’il n’y aura pas de rétroactivité, déplore Charles Lafortune. « Actuellement, c’est Sophie qui est la curatrice de Mathis. Si je veux devenir curateur moi aussi, je devrai donc refaire une évaluation psychosociale et retourner devant le juge. Obtenir la rétroactivité, ce sera notre prochain combat. »

Saviez-vous que l’autisme est en augmentation constante au Québec?  

Autrefois considéré comme rare avec une prévalence de 4 ou 5 sur 10 000 (soit 0,05 % de la population), le taux d’autisme s’élèverait à 1,5 %, selon les données fournies par la Fédération québécoise de l’autisme. Ce chiffre semble toutefois conservateur. Une récente étude aux États-Unis a démontré que parmi les enfants de 8 ans, il y en a 1 sur 68 qui est touché par l’autisme. Le Québec suit cette même courbe.

 


Renseignements (à l’intention des journalistes uniquement) :
Relations publiques Mouvement Desjardins
514 281-7000, poste 5553436
media@desjardins.com