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L'Essentiel de la politique monétaire

La Réserve fédérale poursuit sa pause alors que la hausse des taux obligataires prend le relais de la politique monétaire

1 novembre 2023
Francis Généreux
Économiste principal

Selon la Réserve fédérale (Fed)

  • La Fed maintient le taux d’intérêt cible des fonds fédéraux dans une fourchette de 5,25 % à 5,50 %.
  • L’activité économique a progressé à un fort rythme au troisième trimestre. La création d’emplois s’est modérée depuis le début de l’année, mais demeure forte et le taux de chômage demeure bas. L’inflation reste élevée.
  • La Fed réaffirme que le système bancaire américain est solide et résilient. Le resserrement des conditions financières et des conditions de crédit pour les ménages et les entreprises pourrait probablement peser sur l’activité économique, les embauches et l’inflation. L’ampleur de ces effets reste incertaine. Le Comité reste très attentif aux risques inflationnistes.
  • Pour déterminer l’ampleur du resserrement supplémentaire qui pourrait être approprié, le Comité tiendra compte du resserrement cumulé de la politique monétaire, des décalages avec lesquels la politique monétaire affecte l’activité économique et l’inflation, et de la conjoncture économique et financière.

Commentaires

Encore une fois, la décision prise aujourd’hui n’est pas une surprise. Télégraphié par les commentaires récents de plusieurs dirigeants et correctement anticipé par l’ensemble des 110 prévisionnistes sondés par Bloomberg, le statu quo prolonge la pause amorcée en septembre. La décision a aussi été unanime parmi les 12 membres votants du Comité de politique monétaire. Il sera tout de même intéressant de consulter, dans quelques semaines, le compte rendu de la réunion afin de voir si les discussions au sein du Comité allaient vraiment toutes dans le même sens.

C’est que la performance plutôt positive des indicateurs économiques publiés depuis la réunion de septembre avait le potentiel de changer la donne. Une croissance trimestrielle annualisée de 4,9 % du PIB réel au cours de l’été et l’embauche de 336 000 nouveaux travailleurs en septembre sont difficilement compatibles avec une économie qui ralentit assez pour atténuer suffisamment les pressions inflationnistes. Jusqu’à maintenant, l’économie américaine a été en mesure de passer outre les écueils qui se présentent à elle. En plus du resserrement monétaire déjà effectué, on peut penser au retour des remboursements des prêts étudiants, au conflit de travail dans le secteur automobile, au resserrement des conditions de crédit ou à la montée des incertitudes géopolitiques. C’est toutefois sans compter ce qui a probablement été l’élément central de la décision prise aujourd’hui : la hausse des taux obligataires. Depuis cet été, le taux de rendement des obligations fédérales d’une échéance de dix ans a augmenté d’environ 100 points de base. L’augmentation des taux obligataires a entraîné dans son sillage les taux de détail, y compris ceux des hypothèques, qui ont atteint leur plus haut niveau depuis l’an 2000. Ces hausses de taux prennent donc le relais de la politique monétaire et devraient amener une conjoncture moins forte. La Fed a d’ailleurs pris en compte ce facteur dans son communiqué en ajoutant les conditions financières aux conditions de crédit dans les éléments pouvant peser sur la croissance.

Jerome Powell a d’ailleurs mentionné en conférence de presse que « le plus important est peut-être que les taux de rendement plus élevés sur les titres du Trésor se traduisent par des coûts d’emprunt plus élevés pour les ménages et les entreprises et qu’ils pèseront sur l’activité économique dans la mesure où leur resserrement persiste ». Il a cependant ajouté que la Fed n’est pas encore convaincue que les conditions financières soient suffisamment restrictives pour mettre fin au combat contre l’inflation. Dans ces circonstances, les dirigeants de la Fed ne ferment pas la porte à d’autres hausses de taux directeurs si l’inflation ne se rapproche pas assez de la cible ou si le marché du travail ne ralentit pas davantage.

Implications

Comme prévu, la Fed a opté pour le statu quo. Considérant le resserrement engendré par la hausse des taux obligataires et nos propres prévisions concernant la croissance dans les prochains trimestres, on peut penser que les taux directeurs sont maintenant à leur maximum. La pause entamée en septembre dernier devrait se poursuivre jusqu’à l’été prochain pour ensuite laisser place à des baisses.