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Tendances des matières premières

Guerre au Moyen-Orient, faiblesse de la Chine et baisses de taux d’intérêt… les prochains mois seront volatils pour les matières premières

22 octobre 2024
Jimmy Jean, vice-président, économiste en chef et stratège
Marc-Antoine Dumont, économiste senior • Florence Jean-Jacobs, économiste principale

Sommaire

La croissance économique mondiale est encore plutôt modeste, ce qui permet à l’inflation de continuer de s’atténuer. Cela a incité plusieurs banques centrales à entamer la baisse des taux d’intérêt. C’est notamment le cas pour la Réserve fédérale, qui a abaissé son taux directeur de 5,50 % à 5,00 % en septembre (graphique 1). Plusieurs autres économies avancées avaient déjà commencé l’assouplissement de leur politique monétaire plus tôt cet été, comme le Canada et l’Union européenne. En Chine, le plus important consommateur de matières premières, une nouvelle vague de mesures de relance a été annoncée dans la semaine du 23 septembre afin de stimuler une économie qui semble de plus en plus en difficulté. L’essentiel des initiatives vise à sortir le marché immobilier chinois de son profond et persistant enlisement qui se propage graduellement au reste de l’économie. Toutefois, ce dernier plan de relance ne risque pas de rectifier la situation à lui seul. D’autres mesures budgétaires seront nécessaires afin de stimuler la demande intérieure qui est déprimée depuis maintenant plus de deux ans. Même si des mesures davantage axées sur les consommateurs seraient probablement plus efficaces, le gouvernement chinois penche vers de nouvelles dépenses en infrastructure.


Dans un contexte de demande fragilisée par la faiblesse de l’économie chinoise, les prix de plusieurs produits de base risquent de connaître des mois volatils. C’est notamment le cas du pétrole. La multiplication des affrontements entre Israël, le Hezbollah et l’Iran menace les infrastructures pétrolières du Moyen‑Orient. Même si que le marché mondial devrait retourner en situation de surplus d’ici la fin de l’année, en raison de la faiblesse de la demande chinoise et de la hausse de la production des pays exportateurs de pétrole et ses partenaires (OPEP+), l’élargissement du conflit armé risque de contrebalancer cet effet baissier sur les prix du brut. Près de 25 % de la production mondiale de pétrole se trouve dans la région et pourrait potentiellement être perturbée si la situation s’envenime de façon importante. Sur le plan macroéconomique, il y a des raisons de croire en une amélioration de la demande en 2025. La baisse des taux d’intérêt directeurs devrait permettre de soutenir davantage la croissance économique l’an prochain. De plus, de nouvelles mesures de relance sont attendues du côté de la Chine, ce qui devrait soutenir la demande de métaux et de pétrole. Ainsi, nous anticipons que la majorité des prix des matières premières renoueront avec la croissance dès 2025 (graphique 2).


Énergie

L’OPEP+ veut récupérer ses parts de marché dans un climat géopolitique de plus en plus tendu

Prévisions

Le marché mondial du pétrole entre en situation de surapprovisionnent alors que l’OPEP+ a délaissé sa cible de 100 $ US le baril afin de récupérer les parts de marché perdues à l’Occident depuis 2022. Toutefois, la récente escalade des tensions entre Israël et l’Iran a ravivé les craintes que la production et le transport du pétrole au Moyen‑Orient soient perturbés. Nous avons néanmoins révisé à la baisse notre cible de fin d’année du prix du WTI (West Texas Intermediate) à environ 75 $ US le baril. Cela reflète à la fois l’abondance de l’offre, mais aussi la montée des risques géopolitiques. Nous demeurons d’avis que la baisse des taux d’intérêt permettra aux prix du pétrole de croître à près de 80 $ US le baril en 2025, principalement en seconde moitié d’année. Cela dit, les risques sur cette prévision sont très élevés et la situation au Moyen‑Orient sera à suivre de très près. Du côté du gaz naturel, la fin de El Niño et le possible déclenchement de son opposé, La Niña, devraient profiter aux prix. D’un point de vue international, la modeste croissance attendue en Europe et en Chine devrait limiter le gain anticipé du prix du Henry Hub. Nous prévoyons un prix de fin d’année avoisinant les 2,90 $ US par MMBTU (Million British Thermal Units).

Pétrole

On observe une escalade du conflit au Moyen‑Orient avec de nouveaux tirs de missiles longue portée de l’Iran, des frappes aériennes par Israël et une offensive terrestre dans le sud du Liban contre le Hezbollah. Ces événements ont fait bondir le prix du pétrole de plus de 9 % depuis la fin septembre au début d’octobre (graphique 3). Le changement de ton des États‑Unis, alors que le président Biden a dit en conférence de presse qu’il n’empêcherait pas de possibles frappes israéliennes contre les installations pétrolières iraniennes, a aussi contribué à ce gain. Rappelons que l’Iran représente 3,5 % de l’offre mondiale de pétrole. La situation s’est depuis calmée, mais un risque demeure tandis que de nouvelles frappes sont toujours possibles.


L’OPEP+ a confirmé qu’elle procéderait à la hausse prévue de sa production en décembre et qu’elle abandonnait sa stratégie de contrôle des prix. Il faut rappeler que l’organisation prévoyait initialement réintégrer la coupe de 2,2 mbj (millions de barils par jour) à partir d’octobre et visait un prix par baril de 100 $ US. Constatant son échec à influencer durablement les cours pétroliers, l’OPEP+ se montre maintenant très claire dans ses intentions de récupérer les parts de marché perdues aux producteurs occidentaux. La perte de revenus gouvernementaux des membres du cartel due à la faiblesse des prix et des volumes de production est certainement derrière ce changement de stratégie. Il faut d’ailleurs noter que le groupe produit au-dessus de sa cible depuis maintenant huit mois consécutifs (graphique 4). Cette tricherie grandissante des membres du cartel fait encore une fois écho à notre Point de vue économique Lien externe au site. paru en janvier, qui décrivait le chemin habituel ayant mené l’OPEP+ aux disputes de 1985, 2008, 2015 et 2020. Dans un contexte où la demande mondiale de pétrole est en voie de connaître une décroissance pour le second semestre de 2024, le marché devrait retourner en situation de surplus, surtout avec la hausse de l’offre de la Libye (graphique 5). Il faut aussi noter que les perspectives pour la demande en 2025 ont de nouveau été révisées à la baisse par l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Dans ces circonstances, un risque d’enlisement ou communément appelé « glut » guette le marché du pétrole.



Du côté des États‑Unis, la production de pétrole se maintenait dans la première semaine d’octobre tout juste sous son record, à 13,3 mbj (graphique 6). Le nombre de foreuses en activité, un indicateur précurseur de la production, a toutefois connu une baisse de 6,7 % depuis le début de l’année. Cela reflète la diminution du prix du brut, qui a découragé le forage, et suggère que les gains de la production américaine seront plus modérés dans les prochains mois. L’ouragan Milton a d’ailleurs forcé la fermeture préventive (en anglais seulement) Lien externe au site. de certains sites de production et le déroutement de navires pétroliers. Le département de l’énergie américain a profité des faibles cours pétroliers pour sécuriser l’achat de 6 millions de barils (en anglais seulement) Lien externe au site. afin de renflouer en partie sa réserve pétrolière stratégique (RPS). Même si la livraison des barils ne sera faite que de février à mai 2025, cet achat proactif par le gouvernement américain sert de mécanisme stabilisateur pour l’industrie pétrolière nord-américaine. Il faut rappeler qu’un prix sous la barre des 70 $ US le baril commencerait à effriter les marges de certains producteurs et pourrait entraîner une réduction de l’offre. De plus, l’accroissement hâtif de la RPS pourrait s’avérer prudent étant donné la présente crise au Moyen‑Orient.


Au Canada, la production de l’Alberta était en hausse de 4,1 % en août 2024 par rapport à l’an dernier. Malgré les feux de forêt et la (courte) grève sur les chemins de fer canadiens, les volumes de production et d’exportation ne semblent pas avoir été influencés. L’extension de l’oléoduc Trans Mountain devrait d’ailleurs continuer de soutenir les exportations vers le marché asiatique. Il faudra toutefois attendre avant que cette nouvelle canalisation permette à l’écart entre le WTI et le WCS (Western Canadian Select) de diminuer Lien externe au site.. La conjoncture demeure néanmoins favorable à une hausse de la production canadienne en 2025, tandis que la demande mondiale devrait renouer avec la croissance dès le premier trimestre.

Essence

La baisse des prix du pétrole ainsi que la forte production des raffineries américaines ont entraîné une diminution du prix de l’essence tant aux États‑Unis qu’au Canada (graphique 7). Les marges des raffineries (l’écart entre les prix du brut et de l’essence régulière) ont d’ailleurs chuté à un creux de 11 mois en août dernier. Outre la baisse saisonnière, les déterminants fondamentaux indiquent que le prix de l’essence devrait être relativement stable dans les prochains mois. La demande demeure sous son sommet de 2018 aux États‑Unis et la conjoncture actuelle pointe vers seulement de légers gains de la consommation d’essence dans les prochains trimestres. Cela dit, l’incertitude est élevée alors qu’une escalade des tensions au Moyen‑Orient pourrait entraîner une hausse subite du prix.


Gaz naturel

Après la crise de l’énergie en 2022 causée par la guerre en Ukraine, le marché du gaz naturel nord-américain a connu un enlisement en début d’année, ce qui a amené une chute prononcée des prix (graphique 8). La faiblesse de ces derniers a toutefois forcé un ajustement de l’offre alors que plusieurs producteurs ont opéré à perte. Le nombre de foreuses en activité pour le gaz naturel évolue d’ailleurs sous la barre des 100, un niveau historiquement bas. Pour les prochains mois, le prix devrait connaître une légère augmentation alors que les températures hivernales amèneront une augmentation de la demande de chauffage. La fin de El Niño et le potentiel déclenchement de son opposé, La Niña, pourraient d’ailleurs accroître davantage les besoins énergétiques durant l’hiver. Au Canada, les difficultés économiques de la Chine risquent de ralentir à très court terme les ardeurs de cette industrie en plein essor. Les perspectives demeurent toutefois encourageantes à moyen terme alors que le Coastal GasLink relie la production albertaine à l’océan Pacifique. L’appétit de l’Asie, particulièrement de la Chine, pour le gaz naturel devrait croître de 15 % d’ici 2030 selon l’AIE et le Canada est bien positionné pour en bénéficier.


Métaux de base

Un rebond un peu trop hâtif des prix

Prévisions

Les prix de l’aluminium, du cuivre, du nickel et du minerai de fer ont tous bondi après l’annonce des mesures de relance en Chine à la fin du mois de septembre. Bien qu’elles soient un pas dans la bonne direction, le marché semble surévaluer l’effet de ces dernières. Les cours des métaux de base risquent donc de perdre quelques plumes dans les prochaines semaines. Cela dit, les prix devraient renouer avec la croissance dans les prochains trimestres alors que les baisses de taux directeurs soutiennent la demande en Occident. La seule exception à la règle demeure le prix du minerai de fer. Sa sensibilité accrue au marché immobilier chinois conjuguée aux perspectives peu encourageantes à l’égard de ce dernier et à une offre en progression pointe vers une légère décroissance de son prix en 2025. Toutefois, de nouvelles dépenses en infrastructure pourraient limiter la baisse de son prix.

Aluminium

Après avoir diminué au cours de l’été, le prix de l’aluminium a repris une tendance ascendante en septembre, cumulant un gain mensuel de 2 % (graphique 9). Les perspectives pour les prochains mois, bien que bonnes, sont plus nuancées. D’abord, sur le plan macroéconomique, les mesures de relance en Chine ainsi que l’assouplissement des politiques monétaires à travers le monde devraient appuyer la demande. Toutefois, d’un point de vue sectoriel, la récente faiblesse observée dans l’industrie automobile occidentale pourrait limiter le potentiel de gain de son prix. Au net, nous demeurons d’avis que l’amélioration de la conjoncture économique en 2025 et que les efforts de décarbonation pousseront à la hausse le cours de l’aluminium. Notre cible de fin d’année pour l’an prochain se situe donc à 2 550 $ US la tonne. Les producteurs canadiens pourraient faire face à de nouveaux tarifs Lien externe au site., comme en 2018, advenant une victoire de Trump aux élections du 5 novembre prochain. Cela dit, il y a beaucoup d’incertitude autour de cette éventualité et l’on ne sait pas quand et comment une nouvelle politique protectionniste américaine serait mise en œuvre. De plus, il est difficile d’évaluer l’impact de nouveaux tarifs sur l’industrie canadienne de l’aluminium. En 2018, les effets avaient été plutôt modestes.


Cuivre

Bien que le prix du cuivre soit retourné sous la barre des 10 000 $ US la tonne (graphique 10), les annonces des mesures de relance en Chine l’ont fait bondir de 7,6 % depuis la fin de septembre. Son niveau est cependant un peu élevé comparativement à celui suggéré par les facteurs fondamentaux et nous nous attendons à ce que le prix du cuivre termine l’année autour de 9 000 $ US. À moyen terme, l’inéquation entre la production et les besoins associés à la transition énergétique devrait continuer de soutenir son prix. Le sous-investissement dans le développement de nouvelles mines demeure un enjeu important, surtout que l’on observe un certain progrès du côté des efforts de décarbonation. Il s’agit notamment du cas de l’énergie éolienne et des lignes de transport de l’électricité, qui ont toutes deux une utilisation intensive en cuivre.


Nickel

Le potentiel de gain du prix du nickel est limité alors que le marché demeure en situation de surplus. Si l’on y ajoute la faiblesse de l’économie chinoise, nous anticipons que les prochains trimestres seront relativement stables en ce qui concerne son prix et prévoyons une cible de fin 2025 avoisinant les 20 000 $ US la tonne. Cela n’a toutefois pas empêché celui-ci de bondir à la suite de l’annonce des mesures de relance en Chine, et, à l’instar des autres métaux de base, le prix du nickel devrait redescendre de son récent sommet (graphique 11). Les perspectives sont plus encourageantes à moyen terme, alors que le marché devrait se rééquilibrer et que la demande devrait croître de manière plus soutenue, notamment à cause de la transition énergétique.


Minerai de fer

Le prix mondial du minerai de fer demeure intimement lié à la conjoncture économique en Chine, plus particulièrement à celle de son marché immobilier. Ainsi, la piètre performance de ceux-ci depuis le début de l’année a entraîné un recul du prix de plus de 20 % depuis son sommet de janvier (graphique 12). Encore une fois, les mesures de relance annoncées par le gouvernement chinois ont provoqué une réaction un peu trop forte du prix par rapport aux conditions du marché et celui-ci devrait perdre quelques plumes dans les prochaines semaines. De plus, l’activité industrielle en Europe ne s’est pas encore totalement relevée de la crise énergétique de 2022. Tout n’est pas perdu pour les producteurs canadiens, dont près de 40 % des exportations ont été vers la Chine en 2023. Le minerai de fer à haute pureté, 66 % Fe, produit par les mines québécoises maintient une prime attrayante de 14 $ US la tonne comparativement au prix de référence. Le minerai à très haute pureté, 69 % Fe, maintient un écart encore plus grand alors que son prix évolue autour de 160 $ US la tonne. Minerai de Fer Québec s’apprête d’ailleurs à commencer la production de minerai à très haute pureté en 2025. Il faut tout de même s’attendre à de légères baisses de ces trois prix dans les prochains trimestres.


Métaux précieux

Un environnement favorable au prix de l’or

Prévisions

Une demande financière assez forte, les achats des banques centrales et une certaine spéculation sur les marchés nous amènent à réviser à la hausse notre cible de fin d’année à 2 400 $ US l’once pour 2024 et à 2 500 $ US pour 2025. Le risque de correction du prix du métal demeure toutefois présent. À moyen terme, une progression de la production minière devrait graduellement peser sur le prix de l’or.

Or et argent

La baisse des taux d’intérêt directeurs, les achats des banques centrales et l’incertitude ont entraîné une hausse du prix de l’or de plus de 26 % depuis le début de l’année (graphique 13). Plus récemment, la montée importante des tensions au Moyen‑Orient, alors qu’Israël considérait effectuer des frappes aériennes en territoire iranien, a provoqué une nouvelle flambée de son prix. Ce dernier ne devrait toutefois pas garder l’ensemble de ses gains et devrait redescendre de ses récents sommets dans les prochaines semaines. Les niveaux attendus pour la fin de 2024 et 2025 sont toutefois plus élevés que ce que nous prévoyions récemment. À moyen terme, nous anticipons que la croissance de son prix entraînera une réaction de l’offre. Lorsque le prix réel de l’or augmente, on voit habituellement une réaction positive de la production minière dans les cinq à dix années suivantes comme cela avait été le cas dans les années 1930 et 1980 (graphique 14). Ainsi, nous nous attendons à une modération, voire une décroissance, de son prix à moyen terme. De son côté, le cours de l’argent est retourné à un niveau qui n’avait pas été observé depuis décembre 2011, soit plus de 31 $ US l’once. Grâce à un environnement favorable aux métaux précieux, son prix devrait d’ailleurs continuer de croître dans les prochains trimestres.



Platine et palladium

Le prix du platine a renoué avec la croissance en septembre alors qu’il a fait un gain de 6 % depuis son creux d’août (graphique 15). Les perspectives pour la demande de ce métal se sont quelque peu améliorées, tandis que les ventes de véhicules uniquement électriques ont fléchi en faveur des modèles hybrides et à essence. Rappelons que le platine et le palladium sont utilisés dans la confection des catalyseurs pour les moteurs à combustion. Conjugué aux pressions haussières provenant des baisses anticipées des taux obligataires et à l’aggravation du déficit sur le marché due aux mauvaises performances de mines en Russie et en Afrique, le prix du platine devrait s’accroître dans les prochains trimestres. Le prix du palladium se trouve toutefois dans une situation différente. L’offre de ce métal étant plus forte, le potentiel de gain de son prix est plus limité.


Autres matières premières

La faiblesse de la demande continue de peser sur les prix des denrées agricoles et du bois

Produits forestiers

La faible demande observée durant l’été sur le marché de la construction résidentielle aux États‑Unis semble toujours peser sur les prix du bois d’œuvre (graphique 16). Leur légère progression depuis le creux de juillet semble davantage attribuable à la réduction de l’offre, puisque les fermetures temporaires et permanentes de scieries se multiplient sur le continent nord‑américain, une tendance d’ailleurs observée depuis deux ans. La Colombie‑Britannique est particulièrement touchée, et le Québec n’est pas épargné non plus. Selon les estimations de Madison’s Lumber Reporter (en anglais seulement) Lien externe au site., la production des scieries nord‑américaines a été amputée de 1 707 millions de pieds-planches entre janvier et août 2024 pour cause d’interruptions diverses (principalement des fermetures ou des réductions volontaires de production), soit un déclin de 6 %. Rappelons que les frais d’exploitation des fabricants comprennent le coût du bois rond, son transport, et sa transformation en scierie (soit principalement des salaires et des coûts énergétiques). Tous ces coûts sont considérablement plus élevés qu’avant la pandémie.


Ainsi, la rentabilité des entreprises forestières et des scieries est fortement éprouvée alors que les prix de vente sont trop bas pour dégager des profits. La baisse saisonnière de la construction nord-américaine risque de maintenir les prix à des niveaux relativement bas pour le reste de l’année. Toutefois, il est possible que l’effet des ouragans soutienne la demande de matériaux pour la rénovation et exerce un bref effet haussier sur les prix. Dans les trimestres à venir, les mises en chantiers pourraient remonter aux États-Unis alors que la confiance des constructeurs se relève légèrement et que les baisses de taux stimulent les demandes de prêts hypothécaires. De plus, les deux candidats à la présidence, particulièrement Kamala Harris, se sont engagés à stimuler la construction d’habitations. Ainsi, nous pourrions observer une remontée plus décisive des prix du bois à l’approche de l’été prochain. Or, plusieurs éléments d’incertitude subsistent tant pour les prix que pour la santé financière des entreprises du secteur. Le protectionnisme américain sera-t-il accentué après les élections présidentielles du 5 novembre? Les producteurs canadiens chercheront-ils de nouveaux débouchés? La hausse des droits compensateurs, décrétée en août dernier par le département américain du commerce, sera-t-elle transmise aux acheteurs via une hausse de prix, ou justifiera-t-elle plus de fermetures de scieries au Canada? L’accès à la matière ligneuse sera-t-il réduit par un éventuel décret d’urgence pour protéger le caribou forestier au Québec? Il faudra attendre quelques mois pour répondre adéquatement à ces questions.

Denrées agricoles

La dégringolade des prix a pris fin pour le blé, le maïs et le soya, mais les facteurs baissiers freinent leur remontée (graphique 17). En tête de liste, les difficultés économiques de la Chine, qui ralentissent la demande pour les produits agricoles. L’indice mondial des prix des aliments est d’ailleurs en recul (graphique 18). Rappelons que la Chine est le premier consommateur de blé, de soya et de maïs sur la planète (FAO, 2022 Lien externe au site.).



Du côté de l’offre, les récoltes et la production sont abondantes, tout comme les rendements, tant en Amérique du Nord qu’au Brésil (premier exportateur mondial de soya et au deuxième rang pour le maïs). Il faudra surveiller la météo en Amérique du Sud, dont le temps sec pourrait éventuellement tirer vers le haut les prix du maïs et du soya. Les élections présidentielles américaines pourraient également faire fluctuer les échanges commerciaux de denrées agricoles. En effet, la possibilité d’une victoire de Trump pourrait amener les exportateurs à accélérer les échanges, avant l’imposition d’éventuels tarifs. Les importations de soya américain par la Chine ont d’ailleurs bondi en août par rapport à juillet. La tendance pour l’année écoulée (janvier à août) demeure toutefois celle d’une diminution de la demande chinoise pour la fève américaine (-24 %), en faveur du Brésil (+12 %), en raison des tensions commerciales entre les deux principales économies mondiales (Producteurs de blé du Québec, 2024 Lien externe au site.). En somme, en tenant compte de la balance des facteurs, les conditions militent toujours pour des prix peu élevés pour le blé, le soya et le maïs.

Prix des matières premières



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