- Jimmy Jean, vice-président, économiste en chef et stratège • Hendrix Vachon, économiste principal
Prévisions des devises
Moins de chances de rebond du dollar américain dans un contexte où la Réserve fédérale s’attarde davantage à l’économie
25 septembre 2024
Faits saillants
- La Réserve fédérale américaine (Fed) a commencé son cycle d’assouplissement monétaire sur les chapeaux de roue, avec une baisse de 50 points de base. C’est la réponse qu’elle a jugé nécessaire à la suite des progrès plus rapides que prévu du côté de l’inflation, mais aussi des risques baissiers récemment apparus sur l’économie. La Fed ne souhaite pas voir l’économie américaine et son marché du travail ralentir davantage.
- Le dollar américain a peu bougé après la décision de la Fed. Il s’était déjà considérablement déprécié dans les semaines précédentes en anticipation d’au moins une baisse de 50 points de base décrétée à l’une des rencontres de politique monétaire à l’horaire d’ici la fin de l’année. Pour la suite, les prévisions des dirigeants de la Fed signalent des baisses de 25 points de base pour les prochaines rencontres, ce qui était le minimum attendu par les investisseurs et rien pour justifier une dépréciation supplémentaire du billet vert.
- Les devises de plusieurs pays émergents profitent davantage des baisses de taux d’intérêt aux États‑Unis. Les flux de capitaux vers les pays émergents sont plus sensibles à la politique monétaire américaine. Il devrait maintenant être plus facile d’attirer des capitaux dans ces pays, d’autant plus que l’appétit pour le risque des investisseurs s’est accru avec une Fed officiellement plus prompte à soutenir l’économie.
- Cet optimisme aide aussi les prix des matières premières, mais les rebonds demeurent somme toute limités. C’est vraisemblablement l’une des explications de la sous‑performance du dollar canadien par rapport à d’autres devises. Les difficultés se poursuivent en Chine, ce qui continue d’alimenter des craintes sur la demande pour les matières premières. Il n’est pas certain que les récentes mesures de stimulation économique annoncées en Chine seront efficaces. Du côté du pétrole, c’est une offre abondante qui limite la remontée des prix.
- D’autres facteurs nuisent au dollar canadien. Parmi les principales banques centrales des pays avancés, c’est la Banque du Canada qui a le plus réduit ses taux directeurs depuis le début du cycle d’assouplissement monétaire. L’économie canadienne semble également parmi celles qui ont le plus de difficulté, avec une baisse importante du PIB réel par habitant et un taux de chômage en nette hausse. L’inflation est également plus faible au Canada et il est de plus en plus pressenti que la BdC décrétera une baisse de 50 points de base à sa prochaine réunion.
- L’inflation plus persistante en Europe continue de limiter les attentes en termes de baisses de taux d’intérêt. Cela aide à soutenir plusieurs devises de la région. À plus de 1,33 $ US, la livre sterling se situe actuellement à son plus haut depuis mars 2022. L’euro a récemment testé la barre des 1,12 $ US, une première depuis un an.
- Le contraste est encore plus grand au Japon, où la banque centrale est plutôt en mode « relèvement des taux », après les avoirs maintenus inchangés en 2022 et en 2023. Après plusieurs décennies durant lesquelles l’inflation avait de la difficulté à rester en territoire positif, celle‑ci semble maintenant vouloir se maintenir au‑dessus de 2 %. La variation 3 mois annualisée de l’inflation excluant les aliments et l’énergie s’est établie en hausse, à 3,4 %, en août. Jumelé à la baisse des taux aux États-Unis, ce contexte aide le yen, qui s’échange maintenant aux environs des 143 yens/$ US. Il s’agit d’une forte appréciation par rapport au taux de change de 160 yens/$ US observé en juillet.
Principaux éléments à surveiller
- La devise américaine n’a pas la réputation de faire des gains importants lorsque l’économie va bien. C’est plutôt une devise reconnue pour son rôle de valeur refuge, qui s’apprécie lorsque les craintes augmentent. La poursuite des baisses de taux aux États‑Unis devrait permettre d’éviter un ralentissement trop brusque de l’économie. Nous sommes donc plutôt pessimistes en ce qui concerne le billet vert pour les prochains trimestres. Nos prévisions ne supposent cependant pas l’élection de Donald Trump et la mise en place de mesures protectionnistes. Le cas échéant, le dollar américain pourrait plutôt s’apprécier et des changements à nos prévisions de taux de change seraient requis.
- Que l’économie américaine garde le cap sur la croissance est une bonne nouvelle pour le Canada et pour le dollar canadien. Néanmoins, l’économie canadienne fera face à des vents contraires importants, avec une croissance plus faible de sa population et des renouvellements hypothécaires encore difficiles malgré les baisses des taux directeurs. C’est donc un optimisme modéré que nous avons pour l’économie canadienne et cela limitera le potentiel d’appréciation du dollar canadien. Par contre, une remontée de certains prix des matières premières devrait aider le huard, de même que la réduction des écarts de taux d’intérêt avec les États‑Unis. Actuellement à près 1,35 $ CA/$ US, nous prévoyons que le taux de change convergera vers 1,33 $ CA/$ US l’an prochain.
- La situation économique sera aussi à surveiller en Europe. Le maintien de taux d’intérêt élevés plus longtemps risque d’avoir des effets néfastes sur l’économie. Les plus récents indices PMI suggèrent un ralentissement à venir. Pour l’instant, les banques centrales de la région se montrent encore prudentes dans le rythme des baisses de taux d’intérêt, mais la donne pourrait vite changer si davantage de pressions désinflationnistes se mettaient en place. Il pourrait être plus difficile pour la livre et l’euro de faire des gains dans les mois à venir.
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