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Randall Bartlett
Directeur principal, économie canadienne
Accroche-toi, Canada. Les quatre prochaines années s’annoncent mouvementées.
Envers et contre tous, en 2024, Donald Trump a non seulement battu une nouvelle fois les démocrates dans le collège électoral, mais il a aussi obtenu le vote populaire. Les républicains ont remporté la majorité au Sénat et à la Chambre des représentants. Avec un appareil politique beaucoup plus organisé et une mainmise incontestée sur le Parti républicain, Trump pourra maintenant exécuter son programme avec moins de contraintes qu’en 2016. Ce mandat absolu devrait se traduire par d’importantes baisses d’impôt, moins d’immigration, des barrières tarifaires de plus en plus importantes, une inflation exacerbée, des taux d’intérêt toujours élevés et des déficits budgétaires fulgurants.
Une victoire aussi décisive compliquera les choses pour le Canada. Au début d’octobre, nous avons publié une analyse Lien externe au site. sur les répercussions d’un balayage républicain si Trump était en mesure de mettre en place efficacement toutes les politiques sur lesquelles il s’est prononcé. En supposant l’imposition de tarifs douaniers d’ici la fin de l’année prochaine, nous avons déterminé que le Canada pourrait se retrouver en récession dès la fin de 2025. Dans nos plus récentes Prévisions économiques et financières Lien externe au site., publiées mercredi, nous avons quelque peu modifié ce portrait, en raison du calendrier incertain des barrières tarifaires et de la possibilité que la nouvelle administration soit raisonnable ou que le Canada réussisse à négocier certaines exemptions. Et même si nous n’y croyons pas nécessairement, il faut toujours garder espoir.
Malheureusement, le moment pourrait difficilement être plus mal choisi pour le Canada. En effet, la productivité du pays est anémique Lien externe au site.. Et l’un des principaux moteurs de la croissance au cours des dernières années, la hausse de la population, est sur le point de ralentir Lien externe au site.. En temps normal, cela pourrait certes stimuler l’investissement dans les technologies, la machinerie et l’équipement en lien avec l’automatisation. Toutefois, l’incertitude causée par la perturbation imminente du commerce nord‑américain et mondial pourrait laisser certaines entreprises en plan, et ce, en dépit d’une hausse probable de la demande pour nos exportations en 2025 avant l’entrée en vigueur des barrières tarifaires, ce qui devrait stimuler la croissance du PIB réel global l’an prochain. Même en supposant que le gouvernement du Canada n’atteint qu’une partie de sa cible de réduction du nombre d’admissions de nouveaux arrivants et que l’administration Trump décide de traiter le Canada un peu plus gentiment qu’elle ne le laissait entendre durant la campagne, la croissance économique sera malgré tout beaucoup plus faible que ce que nous avions prévu en octobre. Ce sera d’autant plus vrai en 2026, lorsque les effets des barrières tarifaires et du ralentissement de la croissance démographique commenceront vraiment à se faire sentir (graphique 1). Les conséquences seront encore plus prononcées si les politiques proposées par les gouvernements fédéraux canadien et américain sont pleinement mises en œuvre. Même si, pour le moment, nous ne prévoyons qu’une seule baisse supplémentaire des taux directeurs de la Banque du Canada (BdC) par rapport à notre scénario d’octobre, les risques sont nettement orientés à la baisse.
Pour le gouvernement fédéral, cela risque d’entraîner des déficits plus importants, toutes choses étant égales par ailleurs. Comme nous l’avons indiqué Lien externe au site. à la fin octobre, le simple fait de réduire la population comme prévu et d’atteindre la cible de l’OTAN de 2 % du PIB d’ici 2032 pour les dépenses liées à la défense mènerait à une augmentation constante du ratio de la dette fédérale sur le PIB. Maintenant que Trump se prépare à retourner à la Maison‑Blanche, une telle augmentation est presque inévitable (graphique 2). Ce genre de choc fait un bien piètre point de départ. Mais cela n’a pas toujours été inévitable. Il faut agir de façon responsable quand on déclare des déficits budgétaires exercice après exercice, même s’ils sont moindres que ceux des autres grands pays avancés en proportion du PIB Lien externe au site.. Les hausses d’impôt compensent l’augmentation des dépenses dans le budget fédéral Lien externe au site. et dans les récents plans budgétaires provinciaux Lien externe au site., mais cette source commence à se tarir Lien externe au site..
Justement, parlons maintenant des provinces. Dans notre analyse précédente d’un possible balayage républicain, nous avons présumé que l’énergie pourrait être exemptée des barrières tarifaires afin d’éviter des répercussions négatives sur les consommateurs américains. Si c’est le cas, les provinces productrices d’énergie, en particulier l’Alberta, échapperaient peut-être aux pires répercussions de ces barrières. Cependant, d’autres provinces risquent d’être moins bien protégées, notamment l’Ontario, le Québec et le Manitoba (les exportations du Nouveau‑Brunswick sont aussi très exposées aux États‑Unis, mais sont très concentrées dans les produits du secteur pétrolier). Une part relativement importante de l’activité économique de ces provinces dépend des exportations américaines non énergétiques (graphique 3). Cela pourrait être problématique pour le PIB et la croissance des revenus, pesant possiblement sur l’équilibre budgétaire.
Dans tous les cas, les perspectives économiques et budgétaires canadiennes vont traverser de fortes turbulences. Bien que l’opération charme de la diplomatie ait déjà commencé, il est temps de la faire passer à la vitesse supérieure. Les arguments en faveur d’une relation économique étroite continue entre le Canada et les États‑Unis sont solides, mais cela ne signifie pas que celle-ci ne sera pas mise à l’épreuve. Donc, accroche-toi, Canada. Les quatre prochaines années s’annoncent mouvementées.
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