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Marc Desormeaux
Économiste principal
Canada : avec la reprise des hausses de taux, de nouvelles fissures apparaissent au sein du marché de l’habitation
Faits Saillants
- Les ventes de propriétés existantes ont augmenté d’un modeste 1,5 % sur une base désaisonnalisée en juin, une cinquième hausse consécutive, qui a suivi des avancées de 11,1 % en avril et de 4,6 % en mai. Les achats de propriétés ont dépassé de 4,7 % le niveau de juin 2022.
- Les ventes ont augmenté dans environ la moitié des marchés locaux en juin, contre 70 % en mai. Le grand Toronto a connu sa plus forte baisse (-6,9 %) depuis l’été 2022, tandis que Vancouver a aussi subi un recul en juin (graphique 1). À Ottawa et au Québec, les ventes sont demeurées essentiellement inchangées après de bons gains en mai, tandis que les achats sont restés en bonne position dans les Prairies et à Halifax.
- Pendant ce temps, le prix de vente moyen d’une propriété existante a chuté de 0,7 % pour s’établir à 709 000 $ en juin, une première baisse en cinq mois. C’est tout de même 6,7 % de plus qu’à pareille date en 2022. Malgré tout, le prix de vente se situe maintenant à environ 10 % sous le sommet de février 2022, après avoir récupéré plus de la moitié du terrain perdu jusqu’en janvier 2023.
- Le prix de référence composé, qui tient compte de la composition du marché des activités de vente, a augmenté de 2 % en juin, soit une troisième hausse mensuelle consécutive après 12 baisses de suite. Cela est toutefois inférieur de 4,5 % à ce qu’il était en juin 2022.
- Le nombre de nouvelles inscriptions a augmenté pour un troisième mois d’affilée, surpassant les achats de propriétés avec une progression de 5,9 %. Même si cela a réduit le ratio ventes-nouvelles inscriptions à 63,6 % en juin, il s’agissait du quatrième mois consécutif avec un marché de vendeurs.
- Il y avait 3,1 mois de stock disponible à l’échelle nationale en juin. Ces chiffres sont restés les mêmes par rapport au mois précédent, mais demeurent inférieurs à tout ce qui était observé avant 2020. L’Ontario a été la seule province à enregistrer une hausse à cet égard.
Même si les ventes de maisons n’ont assurément pas ralenti autant que nous le craignions, de nombreux acheteurs potentiels semblent avoir réagi à la décision de la Banque du Canada (BdC) de reprendre les hausses de taux d’intérêt en juin. Le ralentissement de l’élan des ventes de maisons a été assez généralisé, avec des baisses notables à Toronto et à Vancouver, deux marchés dispendieux qui étaient sur une solide lancée depuis plusieurs mois.
La progression soutenue des nouvelles inscriptions (graphique 2), dont la faiblesse passée a contribué aux gains de prix plus tôt cette année, est un développement qui doit être suivi de près. Est-ce une réaction des investisseurs cherchant à anticiper le marché dans un contexte de renforcement des prix ou la réponse de certains détenteurs d’hypothèques à une hausse marquée des taux d’intérêt? Nous le saurons au cours des prochains mois. Malgré tout, la plupart des marchés locaux demeurent serrés en dépit d’un certain rééquilibrage entre l’offre et la demande en juin. Mais si les tendances récentes en matière d’inscriptions persistent dans un contexte de hausse des taux d’intérêt et de ralentissement des activités de revente, cela présente un risque baissier clair pour le prix des maisons au Canada.
Implications
À la mi-parcours en 2023, bon nombre des marchés locaux ont enregistré de solides gains, mais la tendance pour le reste de l’année ne semble pas favorable. Une deuxième hausse des taux d’intérêt plus tôt cette semaine, après la pause qui a débuté en janvier, exercera une pression à la hausse supplémentaire sur les coûts hypothécaires. Cela suggère un nouveau ralentissement des activités de vente au cours des prochains mois, particulièrement dans les marchés coûteux en Ontario et en Colombie-Britannique. Ces derniers ont été les plus touchés lorsque le resserrement monétaire a commencé, et ils ont également connu les pires hausses de paiements hypothécaires depuis le début de la pandémie (graphique 3). Les Prairies présentent encore de meilleures perspectives compte tenu de leur avantage en matière d’abordabilité.
Bien que nous prévoyions un certain refroidissement de l’activité récente dans la revente au cours des prochains trimestres, nous nous attendons également à ce que l’offre de logements neufs recule, ce qui devrait établir un plancher pour les prix. La construction résidentielle n’a pas fléchi autant que prévu pendant la période de hausse des taux d’intérêt. Historiquement, ce phénomène ne dure pas, surtout si la croissance économique ralentit, que les coûts de financement sont élevés et que l’activité de revente reste bien en dessous de son récent sommet. Et bien sûr, la croissance de la population continue d’atteindre des sommets jamais vus depuis plusieurs décennies, ce qui complique la tâche de fournir suffisamment de logements abordables aux acheteurs potentiels.
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