- Randall Bartlett
Économiste en chef adjoint
Canada : la fin du congé de TPS/TVH fait bondir l’inflation, mais les problèmes de la Banque du Canada ne font que commencer
Faits saillants
- Après une hausse de 1,9 % en janvier, l’IPC global a augmenté de 2,6 % sur un an en février, ce qui est nettement supérieur aux attentes consensuelles des économistes (2,2 %). Les prix ont progressé de 1,1 % d’un mois à l’autre, et de 0,7 % après ajustement en fonction des effets saisonniers. Le tableau 1 résume les principales données.
Implications
Comme le congé de deux mois de TPS/TVH a pris fin le 15 février, le fait que l’inflation ait dépassé la cible de 2 % de la Banque du Canada (BdC) en février n’est pas une surprise. Toutefois, peu d’économistes avaient prévu qu’elle atteindrait 2,6 % sur un an. Le rebond est surtout attribuable aux prix des aliments, qui ont progressé de 1,3 % après avoir reculé de 0,6 % en janvier (graphique 1). En effet, le coût des aliments achetés au restaurant a diminué à un rythme plus lent (-1,4 % en février contre -5,1 % en début d’année). Cependant, l’inflation de l’IPC excluant les aliments a de nouveau accéléré, atteignant 2,9 % en février, contre 2,4 % en janvier. Cela peut être attribué, en partie, au retour de la TPS/TVH sur diverses marchandises, comme les boissons alcoolisées, à partir du milieu du mois. Cela dit, nos estimations suggèrent que l’inflation totale mesurée par l’IPC se serait établie plus près de 3 % en février sans l’exemption de taxe fédérale. En même temps, les vents inflationnistes liés à l’énergie se sont atténués, passant de 5,3 % en janvier à 3,0 %, grâce à une hausse mensuelle plus modeste de 0,6 % des prix de l’essence en février.
Si la fin du congé de taxe a contribué à l’augmentation des prix des biens en février (1,5 % en variation annuelle), la croissance des prix des services a elle aussi accéléré à 3,6 % en février (elle était de 2,8 % en janvier). Une progression de 18,8 % des prix des voyages organisés en est en partie responsable. Cela dit, bien que l’inflation liée au logement continue d’apporter la plus grande contribution à l’inflation globale, elle a maintenu son ralentissement, atteignant son rythme le plus lent depuis mai 2021. En réalité, l’apport de l’inflation de base de l’IPC excluant le logement à l’inflation totale de l’IPC d’une année à l’autre a presque triplé en février par rapport à janvier, apportant une contribution presque égale à celle de l’inflation de base incluant le logement pour la première fois en presque deux ans (graphique 2).
En ce qui concerne l’inflation sous-jacente, les mesures privilégiées de la BdC pour évaluer la croissance des prix de base d’une année à l’autre, soit l’IPC médian et la moyenne tronquée, ont accéléré de deux dixièmes de point en février (2,9 % en moyenne par année). La moyenne mobile annualisée sur trois mois de ces séries désaisonnalisées a augmenté en février pour s’établir à une moyenne de 3,3 %, un rythme égal ou supérieur à 3,0 % pour le cinquième mois consécutif. Mais les mesures traditionnelles de l’inflation sous-jacente sont plus préoccupantes. Par exemple, la moyenne mobile désaisonnalisée sur trois mois de l’IPC total excluant les aliments et l’énergie (une mesure plus couramment utilisée) a bondi à 4,5 %, comparativement à 2,7 % en janvier (graphique 3). Pendant ce temps, la mesure de l’inflation sous-jacente auparavant privilégiée par la BdC, soit l’IPC total excluant les huit composantes les plus volatiles et les impôts indirects, est passée de 3,4 % à 4,7 % lorsque calculée de façon similaire. Somme toute, l’inflation sous-jacente a montré des signes d’accélération en février, peu importe de quel côté on la prend.
L’incidence du congé de TPS/TVH a commencé à s’estomper dans les chiffres de l’inflation mesurée par l’IPC en février, et lorsqu’elle sera entièrement dans le rétroviseur, en mars, la croissance des prix devrait à nouveau progresser. En effet, tout comme la BdC, notre équipe de Desjardins, Études économiques Lien externe au site. prévoit une inflation d’au moins 2,5 % sur un mois en mars. Conjuguée à la récente hausse des anticipations d’inflation des consommateurs, cette situation devrait, à notre avis, inciter la BdC à interrompre son cycle de baisse des taux en avril, du moins temporairement.
La BdC aura toutefois bien d’autres luttes à mener sur le front de l’inflation à mesure que l’année progressera. D’entrée de jeu, les tarifs de représailles et l’affaiblissement du dollar canadien devraient exercer une pression à la hausse constante sur l’inflation, malgré le ralentissement économique Lien externe au site.. Mais ce recul sera compensé par la baisse des prix de l’énergie à compter d’avril 2025 en raison de l’élimination de la tarification fédérale sur la pollution. La BdC estime que cette mesure pourrait réduire l’inflation de 0,7 point de pourcentage dès maintenant et avoir un effet similaire sur la hausse des prix pour l’année suivante, la maintenant à un niveau plus faible qu’elle l’aurait été autrement (surveillez notre analyse à paraître demain sur le sujet). Cela permettra non seulement de réduire l’inflation réelle, mais aussi de contenir les anticipations d’inflation des consommateurs, compte tenu de la nature très visible des prix de l’essence. Par conséquent, nous ne sommes pas convaincus que la BdC a déjà fini d’abaisser son taux directeur.
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