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Jimmy Jean
Vice-président, économiste en chef et stratège
La Chine, une alliée dans la lutte contre l’inflation
En Chine, quand ça va mal, ça va mal. Cette semaine, nous avons appris que les exportations de ce pays ont reculé plus que prévu en juillet. La chute de 14,5 % est la plus importante depuis février 2020, bien que ce chiffre soit quelque peu amplifié par l’effet de glissement annuel. Ce n’est là qu’une seule d’une série de déceptions en provenance de l’empire du Milieu. La croissance du PIB au deuxième trimestre a été nettement inférieure aux attentes et les détails des données ont été mauvais. Un large éventail de sous-composantes montre des signes de détérioration continue, notamment la consommation et le secteur de l’habitation. Et bien sûr, la Chine fait face à d’autres défis, comme les restrictions commerciales imposées par l’Occident et la hausse du taux de chômage chez les jeunes. La tendance à la baisse persistante des investissements directs étrangers au gré de la reconfiguration des chaînes d’approvisionnement des multinationales vient s’ajouter à ces problèmes. Nous n’avons jamais vraiment cru que la réouverture de la Chine sauverait l’économie mondiale cette année. Jusqu’à présent, il ne s’est pas produit grand-chose pour nous contredire.
Ironiquement, les tracas de la Chine sont utiles dans la lutte contre l’inflation. Le contexte inflationniste unique en Chine, où les prix des producteurs et des exportations sont en déflation, se répercute à l’externe. Comme elle est un important pôle manufacturier mondial, la baisse des prix influence les indices de prix à l’importation dans les pays qui s’appuient sur ses importations. Par exemple, le récent rapport sur le commerce international du Canada souligne la plus forte baisse mensuelle des prix à l’importation depuis 2017. Cette tendance à l’affaiblissement s’étend maintenant au-delà des composantes des matières premières pour englober également les biens de consommation, qui représentent la troisième catégorie d’importation la plus importante après l’énergie et les véhicules. Entre décembre et juin, les prix à l’importation dans cette catégorie ont baissé de plus de 2 %.
Cette évolution valide nos conclusions Lien externe au site. S'ouvre dans une nouvelle fenêtre. selon lesquelles l’inflation excédentaire des économies avancées est moins déterminée par des facteurs mondiaux et désormais davantage influencée par des forces intérieures. On estime Lien externe au site. S'ouvre dans une nouvelle fenêtre. que les pressions sur les prix à l’importation ont représenté jusqu’à la moitié de l’inflation de la demande intérieure durant la majeure partie de 2022. Il s’avère donc que la Chine est une alliée dans la lutte contre l’inflation, plus encore qu’un gouvernement faisant la sourde oreille aux appels à la modération du rythme d’admission des nouveaux arrivants. Bien que nous convenions que la démographie est importante pour la viabilité à long terme des finances publiques, nous avons observé Lien externe au site. S'ouvre dans une nouvelle fenêtre. que le fait de ne pas baliser adéquatement les admissions de résidents non permanents entraînait des coûts non négligeables à court terme.
Quoi qu’il en soit, la Banque du Canada (BdC) est probablement à l’aise avec le degré actuel de resserrement monétaire pour le moment. La récente hausse des prix du pétrole pourrait-elle venir gâcher la sauce? Certes, les banques centrales garderont le rebond des prix du pétrole à l'œil, lui qui dure maintenant depuis plus de sept semaines. Cela dit, nous ne croyons pas qu’il y ait lieu de s’inquiéter outre mesure pour le moment. Cette hausse fait suite à la réduction prolongée de la production de l’Arabie saoudite, qui a coïncidé avec des données économiques américaines solides et les signes d’un atterrissage en douceur qui en résultent chez nos voisins du Sud. La mauvaise conjoncture en Europe et en Chine a toutefois tendance à contrebalancer les perspectives plus optimistes aux États-Unis. De plus, la gestion de l’offre de pétrole de l’OPEP est confrontée aux producteurs de schiste américain, qui signalent une hausse de la production pour le reste de l’année au gré de leurs gains de productivité. Par conséquent, l’augmentation des prix ne repose pas sur des bases solides, et les craintes d’un nouveau regain de l’inflation attribuable à l’énergie semblent prématurées. Au Canada, il reste une certaine marge de manœuvre avant que l’essence ne commence à contribuer positivement à la variation annuelle de l’inflation. L’effet de glissement annuel rend ce scénario peu probable avant la fin de 2023, au plus tôt.
D’ici là, en septembre, le cycle de hausses de taux en sera à son 18e mois, ce qui implique que nous entrons dans la période où les effets retardés du resserrement sont à leur maximum. Comme nos travaux l’ont indiqué (ici Lien externe au site. S'ouvre dans une nouvelle fenêtre. et ici Lien externe au site. S'ouvre dans une nouvelle fenêtre.), les renouvellements hypothécaires contribueront fortement à éroder la capacité de dépenses discrétionnaires des ménages, ce qui accentuera davantage la détérioration des mesures de stress financier constatée récemment.
La généralisation de la faiblesse devrait aussi rattraper les salaires, alors que l’augmentation surprise de la croissance de la rémunération en juillet a accentué les rumeurs d’une nouvelle hausse de taux. Il serait plus juste d’affirmer que les salaires réagissent sur le tard au resserrement précédent du marché du travail. À travers ce bruit, les pertes d’emploi, qui dans certains cas viennent annuler les embauches excessives passées, ainsi que le recul des heures supplémentaires et des postes disponibles constituent le véritable signal. Les employeurs ont aussi de moins en moins de difficulté à recruter de la main-d’œuvre, ce qui atténuera éventuellement la croissance des salaires. Tout cela peut être prometteur pour les gens qui souhaitent voir les taux d’intérêt se modérer, mais ce n’est que parce que les signes de récession risquent de devenir de plus en plus évidents à l’avenir.
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