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Randall Bartlett
Directeur principal, économie canadienne
Canada : les ménages plus riches, mais en situation plus précaire en 2023
Faits saillants
- Les ménages canadiens étaient plus riches au T4 2023, le patrimoine net ayant augmenté de 1,8 % (300 G$) au cours du trimestre, compensant en grande partie la baisse du trimestre précédent. Cette progression est attribuable à un rebond des rendements des marchés financiers, alors que les capitaux propres et les obligations ont rebondi, surpassant ainsi le modeste repli de la valeur de l’immobilier résidentiel. Pour l’ensemble de l’année 2023, les ménages canadiens étaient environ 712,7 G$ plus riches qu’en 2022, même si cette progression est l’affaire d’un nombre relativement peu élevé de ménages.
- Parallèlement, le rythme d’emprunt a augmenté pour un deuxième trimestre consécutif au T4, les ménages ayant demandé 29,5 G$ en financement. Bien que la grande majorité de ces hausses concerne les prêts hypothécaires (21,3 G$), l’augmentation de 8,2 G$ du crédit à la consommation fait du T4 2023 le deuxième trimestre en importance pour les octrois nets depuis 2009. Cette situation est préoccupante, car elle laisse présager que de nombreux ménages canadiens pourraient avoir de plus en plus de difficulté à joindre les deux bouts.
- L’endettement des ménages sur le marché du crédit est maintenant supérieur à 2,9 T$, dont près des trois quarts sont des prêts hypothécaires. Toutefois, pour remettre les choses en contexte, l’endettement des ménages représentait 178,7 % de leur revenu disponible au T4, soit une légère diminution par rapport au T3 et le niveau le plus bas en dehors de la pandémie depuis la fin de 2015 (graphique 1). Cela dit, ils ont été, et de loin, les plus endettés du G7 en 2022, et si l’on se fie aux données de 2023, la situation n’a probablement pas changé.
- Pour sa part, le ratio du service de la dette des ménages, soit la part du revenu disponible consacrée au remboursement de leurs dettes, est resté stable à environ 15,0 % au T4. Ce pourcentage demeure près du plus haut niveau enregistré depuis le début de la collecte de ces données en 1990 (bien qu’il soit à noter que le T3 a été révisé considérablement à la baisse, soit de 15,2 % à 15,0 %). Le coût du service de la dette hypothécaire en est le principal responsable, ayant atteint des sommets records dès que la Banque du Canada (BdC) a commencé à relever les taux d’intérêt en 2022 (graphique 2). En effet, la portion « intérêts seulement » du ratio du service de la dette hypothécaire est à son plus haut depuis 1996. En revanche, ces mesures relatives du coût du service de la dette hypothécaire se sont largement stabilisées au T4 pour la première fois depuis que la BdC a amorcé le cycle de hausses de taux actuel.
- La stabilisation du ratio du service de la dette au T4 reflète une augmentation à la fois des paiements de la dette et du revenu disponible d’environ 1,3 % au cours du trimestre. Même si la rémunération plus élevée des employés a contribué à calmer le jeu, les gains ont de nouveau été concentrés dans les revenus de location, d’habitation et autres revenus au dernier trimestre. Cette bonne nouvelle a toutefois été quelque peu atténuée par la hausse des transferts nets versés par les ménages aux gouvernements et à d’autres institutions.
Implications
Les ménages canadiens ressentent de toute évidence les effets de la hausse des taux d’intérêt, eux qui consacrent une part de leur revenu plus importante que jamais au remboursement de leur dette hypothécaire. Cependant, il faut se rappeler qu’une part importante des emprunteurs n’ont pas encore renouvelé leur prêt hypothécaire et n’ont donc pas pleinement ressenti les répercussions de la hausse des taux d’intérêt. Ils devront aussi payer des mensualités plus élevées. Nous croyons qu’ils sont bien conscients de cette détérioration imminente de leur situation financière. Cela contribue à expliquer le taux d’épargne toujours élevé au Canada, en particulier par rapport aux États−Unis. La consommation des ménages a elle aussi peu varié au cours des derniers trimestres, malgré une forte croissance de la population, une tendance qui devrait se poursuivre avec les renouvellements hypothécaires en cours.
Le ralentissement de la consommation des ménages en raison de la hausse des paiements d’intérêts est ce que vise la politique monétaire restrictive de la BdC. Avec le ralentissement de l’inflation Lien externe au site., cette dernière a commencé à adoucir le ton Lien externe au site. un tant soit peu. Nous pensons que l’inflation continuera à se rapprocher de l’objectif de 2 % fixé par la Banque au cours de l’année. Compte tenu du rôle de la politique monétaire dans le maintien d’une inflation supérieure à ce qu’elle serait autrement, nous croyons qu’il est possible que la BdC lève progressivement le pied avant que celle-ci n’atteigne 2 %. Par conséquent, nous sommes d’avis qu’elle annoncera ses premières réductions de taux d’intérêt en juin.
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